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2012-03-27

2012-03-25/26: Theo Bleckmann, Gareth Dickson, Peters/Roden, I Treni Inerti, John Zorn


Journal d'écoute / Listening Diary 
2012-03-25/26

THEO BLECKMANN / Hello Earth!: The Music of Kate Bush (Winter & Winter)
J’adore Kate Bush. J’aime beaucoup Theo Bleckmann, à la voix incomparable. Bleckmann adore Kate Bush aussi et, au jugé des chansons qu’il a sélectionnées pour ce projet hommage, lui et moi jetons notre dévolu sur les mêmes albums clés: The Dreaming, Hounds of Love et The Sensual World – ces trois disques portent dix des quatorze chansons réarrangées par Bleckmann. Il est entouré d’un ensemble de haut calibre comprenant Henry Hey, Caleb Burhans, Skuli Sverrisson et John Hollenbeck. La touche Bleckmann est partout sur ce disque, une touche au bagout jazzé, à la fibre baroque, au souffle contemporain, toujours dans le respect de la mélodie et, surtout, des textes splendides de Kate Bush. Et Bleckmann tape dans le mille plusieurs fois: le plaidoyer de tendresse qu’est “Running Up That Hill,” une “Suspended in Gaffa” d’abord méconnaissable,” une “Violin” presque heavy metal, “Cloudbusting” d’un optimisme qui brasse toujours en moi des émotions vives, délicate “All the Love”, et encore et encore. Seul bémol: Bleckmann pèche par mollesse à quelques reprises, particulièrement dans “And Dream of Sheep”, inconsistente, et dans “Hello Earth” qui aurait mérité plus de fougue. Détails mineurs. En passant, très belle pochette dans la série cartonnée de Winter & Winter.  [Ci-dessous: “All the Love” en concert.]
I love Kate Bush. And I really like Theo Bleckmann, he with the unique voice. Bleckmann loves Kate Bush too and, judging from the track list, he and I both favour the same key albums: The Dreaming, Hounds of Love, and The Dreaming – these three account for ten of the fourteen songs rearranged herein. Bleckmann is backed by a top band consisting of Henry Hey, Caleb Burhans, Skuli Sverrisson, and John Hollenbeck. His touch is felt and heard all over the album: jazzy stance, Early Music vibe, contemporary soul, all with the utmost respect for Bush’s melodies and, most of all, exquiste lyrics. And Bleckmann hits the bull’s eye several times: the plea of “Running Up That Hill,” a reading of “Suspended in Gaffa” that starts off unrecognizable, a heavy-metal take on “Violin,” “Cloudbusting” infused with an optimism that always shakes me to the core, a delicate “All the Love,” and more and more. My only quabble is that Bleckmann’s approach gets too soft a few times, especially in “And Dream of Sheep” (inconsistent version) and “Hello Earth,” who deserved a more passionate reading. Minor quabbles, mind you. Released with a beautiful cover in Winter & Winter’s hardcover series. [Below: Live performance of “All the Love.”]


2012-03-26

GARETH DICKSON / Quite a Way Away (12k - merci à/thanks to Dense Promotion)
Voilà: la transformation de l’étiquette 12k, de la techno minimaliste à la chanson, est maintenant complétée. Le glissement heureux de l’électronique vers l’électroacoustique et l’acoustique, puis de l’instrumental vers la parole, trouve un point d’aboutissement dans ce beau disque de chansons acoustiques signé Gareth Dickson. Il a une voix de beau ténébreux, des textes où la souffrance et le cheminement sont universalisés pour permettre à l’auditeur d’y insérer ses propres expériences. Un disque simple mais d’une grande élégance.
Here we are: the 12k label’s transformation from minimal techno to songwriting is complete. The welcome slide from to electronica to electroacoustic to acoustic music, and then from instrumental music to lyric-based songs finds its culmination in this beautiful CD of acoustic songs by Gareth Dickson. He has the voice of a dark and handsome character, and lyrics were suffering and personal growth are universalized to let the listener insert his or her own personal experience between the words. A simple and very elegant record.

 STEVE PETERS & STEVE RODEN / Not a Leaf Remains as It Was  (12k - merci à/thanks to Dense Promotion)
Ces deux Steve-là représentent bien le courant microsonore des musiques expérimentales d’aujourd’hui. Et dans toute l’œuvre de Steve Roden, je préfère les projets où il chante, ou du moins où il utilise sa voix, frêle et timide. Not a Leaf Remains as It Was est un projet fondé sur la voix, le texte, la chanson, approchée par la lorgnette microsonore. Au menu: quatre pièces de sept à onze où les deux Steve chantent, dans un exercice d’autoeffacement extrême, des mots pigés dans un recueil de poèmes japonais - l’objectif étant d’avoir un matériau phonétique sans réel signifiant ou signifié. Un harmonium, un mélodica, quelques objets suffisent à habiller - d’un rien - ces airs immatériels. À écouter très attentivement.  [Ci-dessous: Un avant-goût de l’album.]
These two Steves are key artists in the microsonic movement. And among Steve Roden’s works I prefer those where he sings - or at least where he makes use of his fragile, shy voice. Not a Leaf Remains as It Was is a project based on voice, text, and song, as seen through a microsonic lens. Four pieces, seven to eleven minutes in duration, where Steve and Steve, in an extreme self-effacing exercise, sing words picked out of a Japanese poetry book – phonetic material used with any real signifier or signified. A pump organ, a melodica, a few objects are enough to - barely - dress up these immaterial melodies. Listen carefully. [Below: A preview of the album.]

I TRENI INERTI / luz azul (Flexion)
I Treni Inerti est un duo formé de Ruth Barberán à la trompette et d’Alfredo Costa Monteiro à l’accordéon. Tous deux utilisent aussi des objets et des préparations. Tous deux ont une approche radicalement silencieuse et bruitiste (non, ce n’est pas contradictoire) de leur instrument. Luz Azul est une improvisation continue de 48 minutes enregistrée en plein air, en pleine nuit, entre deux voies ferrées. Deux trains passent pendant la pièce et ils sont, de loin, les intervenants les plus bruyants dans ce tableau quasi statique mais étonnamment organique.
I Treni Inerti is a duo between Ruth Barberán (trumpet) and Alfredo Costa Monteiro (accordion). Both are also using objects and preparations. And both have a radically silent and noise-based approach to their instrument. Luz Azul is a continuous 48-minute improvisation recorded outdoor, at night, between two railroads. Two trains pass by during the piece, and they are by far the loudest actors in this play. A near-static yet surprisingly organic play.

JOHN ZORN / Mount Analogue (Tzadik)
Je poursuis mon rattrapage de la discographie de Zorn avec une deuxième salve de cinq disques, (il y a eu une première salve le mois dernier) à commencer par Mount Analogue, une parution toute récente. Il s’agit d’une œuvre en un seul mouvement de 38 minutes, constitué d’une soixantaine de moments brefs, tous composés. Pour cette pièce, Zorn s’est plongé dans l’univers mystique de G.I. Gurdjieff (directement et à travers le prisme de René Daumal). Je ne suis pas familier avec ce corpus, mais, comme toutes les compositions à fiches de Zorn, nul besoin de l’être. Mount Analogue est une œuvre foisonante dans laquelle on s’égare facilement mais de bon cœur, entre des fragments musicaux très mélodiques, dans l’axe In Search of the Miraculous, portés par Cyro Baptista, Kenny Wollesen, Tim Keiper (ça fait trois percussionnistes), Shanir Ezra Blumenkranz (oud et basse) et Brian Marsella (claviers). Agréable mais un peu confus à la première écoute, mais je suis sûr que les écoutes ultérieures révéleront de grandes choses.
I’m back on catching up with Zorn’s discography, with a second run of five records (there was a first run last month), and I’m starting with a very recent release called Mount Analogue. A 38-minute one-movement piece made of 60 short through-composed moments. For this work, Zorn has immersed himself in the works of G.I. Gurdjeff (directly and through René Daumal’s prism). I am not familiar with this corpus, but, like all of Zorn’s file card compositions, you don’t need to be to appreciate the music. Mount Analogue is a rich piece in which you easily and lightheartedly get lost, between highly melodic musical fragments (think In Search of the Miraculous). The project is performed by Cyro Baptista, Kenny Wollesen, Tim Keiper (that’s one, two, three percussionists), Shanir Ezra Blumenkranz (oud and bass), and Brian Marsella (keys). Enjoyable but a bit unruly on first listen, although I’m sure future listens will reveal greater, deeper things.

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