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2014-03-08

2014-03-06: Ari Brown, Delmark 60 Years of Jazz, Adasiewicz/Erb/Roebke, Aspirin, Cheveu x2, Areski-Fontaine

Journal d'écoute / Listening Diary 
2014-03-06

ARI BROWN / Groove Awakening (Delmark)
Le saxo (ténor et soprano) Ari Brown, accompagné de Kirk Brown au piano, du bassiste Yosef Ben Israel, du batteur Avreeayl Ra et du percussionniste Dr. Cuz. Jazz sympa, plutôt laid-back, assez conventionnel pour un gars qui a travaillé avec des membres de l’AACM. Ses essais au jeu à deux saxos simultanés n’arrivent pas à me convaincre, mais autrement il a un son chaud qui me plaît. Pas sûr de sa version reggae de “Lonnie’s Lament”, mais certaines compos originales  ont du panache: “One for Ken” et “Enka”, particulièrement.
Sax man (tenor and soprano) Ari Brown, backed by pianist Kirk Brown, bassist Yosef Ben Israel, drummer Avreeayl Ra, and percussionist Dr. Cuz. Enjoyable, rather lakd-back jazz, pretty conventional-sounding for a guy who once played with members of the AACM. His forays into dual horn playing aren’t convincing to these ears, but when he sticks to a single horn he’s got a warm sound that I like a lot. Not sure about his reggae take on “Lonnie’s Lament”, but some of his originals, like “One for Ken” and Enka,” have flair.

ARTISTES VARIÉS-VARIOUS ARITSTS / Delmark: 60 Years of Jazz (Delmark)
L’an dernier, l’étiquette blues-jazz Delmark célébrait ses 60 ans. Cette compilation propose un mélange aguichant de vieux, de nouveau et même de vieux nouveau (un morceau des Fat Babies, un groupe actuel de jazz traditionnel). Content de voir les noms de Josh Berman et Jason Adasiewicz figurer sur ce disque, ils représentent très bien la jeune génération. Content d’y voir aussi Nicole Mitchell et Rob Mazurek comme tenants d’un jazz actuel exploratoire. J’ai moins d’intérêt pour les trucs des années 50 et 60, mais l’ensemble est tout de même bien équilibré, quoique clairement orienté vers le jazz plus mainstream. Notez qu’il n’y a rien ici qui n’est déjà paru ou à paraître prochainement.
Last year, jazz-blues label Delmark celebrated its 60th anniversary. This compilation CD features a catchy blend of old, new, and even some new old (a track by traditional jazz revivalists The Fat Babies. I’m happy to see the names of Josh Berman and Jason Adasiewicz on this disc – they’re great representatives of the young generation. Also happy to see tracks by Nicole Mitchell and Rob Mazurek, excellent proponents of experimental, avant-jazz. I’m less interested in the tracks from the ‘50s and ‘60s, but the disc as a whole fares well, though definitely geared toward a more mainstream sound. Note that there’s nothing here that isn’t already or soon-to-be available.

JASON ADASIEWICZ, CHRISTOPH ERB & JASON ROEBKE / Yuria’s Dream (Veto Records)
Parlant du vibraphoniste Jason Adasiewicz, le voici en compagnie de Christoph Erb (saxo ténor et clarinette basse) et Jason Roebke (contrebasse), dans une improvisation de 43 minutes captée en studio en novembre 2013. Tout simplement merveilleux, un de ses moments magiques dont la sortie sur disque est pleinement justifiée. On a souvent l’impression qu’il s’agit d’une composition – la structure générale, l’à-propos des solos (celui d’Adasiewicz est un trésor de finesse), le jeu d’ensemble. Tout coule de source, sans rien de gratuit.
Speaking of vibes player Jason Adasiewicz, here he is with Chrisoph Erb on tenor sax and bass clarinet, and Jason Roebke on bass, in a 43-minute improvisation recorded in a studio in November 2013. It’s just plain gorgeous, a magical moment oh so worthy of getting released. I often got the impression that the material was composed – the overall structure, the perfect placement of the solos (Adasiewicz’s is a treasure of refinement), the collective playing. Everything flows naturally, nothing sounds forced or tries too hard.

ASPIRIN / Aspirin (Metonic Records - merci à/thanks to Dense Promotion)
À la base, Aspirin est un groupe de rock instrumental actuel – déjanté, un peu punk, pièces développées à travers l’improvisation libre – dirigé par le claviériste Manuel Engel. Or, sur ce premier disque, un mini-album de 17 minutes, Aspirin a invité la chanteuse française Ana Igluka. Sa contribution est cruciale: quatre textes et autant de chansons qui alternent avec quatre instrumentales, le tout très court. C’est très réussi. Influences arabes et africaines, en plus du no-wave et de l’impro. Solide travail de studio. À suivre de très près.
Aspirin is basically an instrumental avant-rock band – off-kilter, a bit punkish, pieces developed through free improvisation – led by keyboardist Manuel Engel. However, for this 17-minute EP – their debut – Aspirin invited French singer Ana Igluka to contribute to four songs. And these songs alternate with four instrumentals – all tracks are pretty short. It’s very well done. Arabic and African influences, in addition to no-wave and free improvisation. Very strong studio production. I’ll follow these guys closely.

CHEVEU / 1000 (Born Bad Records)
Deuxième album du groupe français Cheveu, paru en 2011. Chanson déjantée qui emprunte à Devo, au no-wave, à Ludwig von 88. Textes en français et en anglais, pas toujours compréhensibles. Ce groupe n’a pas peur du ridicule et pousse même une ou deux tentatives hip-hop. “No Birds” est très sympa.
Second album by French band Cheveu, released in 2011. Off-kilter rock songs borrowing from Devo, no-wave, and Ludwig von 88. Lyrics sung in French and English – not always intelligible though. This band isn’t afraid of ridicule and even takes a couple of stabs at hip-hop. “No Birds” is a lot of fun.

CHEVEU / Bum (Born Bad Records – merci à/thanks to Forced Exposure)
Tout nouvel album, leur troisième, à paraître dans deux semaines. Meilleur que 1000 parce qu’il est plus ramassé – chansons plus longues, moins nombreuses, un ensemble moins éparpillé. Les références demeurent les mêmes. “Polonia” ajoute des choeurs et prend des allures grandiloquentes (six minutes aussi, tout de même). Et le doublé “Madame Pompidou” et “Monsieur Perrier” est jouissif au possible. Une folie plus meurtrière. Ce disque me fait penser à une incarnation un plus heavy de Mr. Vast. Recommandé.  [Ci-dessous: Vidéo officielle pour “Polonia”, le premier extrait de l’album; c’est loin d’être la meilleure chanson.|
This one’s brand new – coming out officially in two weeks. And it’s better than 1000: more focused, with less (and longer) songs, less scattered stylistically. The references stay the same. “Polonia” adds a choir and takes grandiloquent poses (it’s also six minutes long). And the tracks “Madame Pompidou” and “Monsieur Perrier” are a blast. This album’s just as crazy as the previous one, but it’s more efficient. It makes me think of a slightly heavier-sounding take on Mr. Vast.  [Below: Official video for “Polonia”, which is far from being the best song on the album.]


ARESKI-FONTAINE / Je ne connais pas cet homme (Saravah)
Paru en 1973 et crédité sur la pochette uniquement à Brigitte Fontaine, Je ne connais pas cet homme est en fait le premier disque du tandem Areski-Fontaine. Ma première écoute me laisse perplexe: beaucoup de cordes, des chansons plutôt sombres, une écriture qui n’atteint pas encore le niveau d’ironie et de sous-entendu que j’aime tant sur Le Bonheur ou Vous et nous. Par contre, il y a “C’est normal”, dont l’humour décapant rachète bien quelques lacunes de ces débuts.
Released in 1973 and credited on the cover solely to Brigitte Fontaine, Je ne connais pas cet homme is actually the first LP by the duo Areski-Fontaine. My first listen leaves me confused: lots of strings, rather dark songs, and songwriting that’s simply not on par with the levelof irony and subtext I find so enjoyable on Le Bonheur and Vous et nous. However, this LP has “C’est normal”, whose dark humour compensates for some of the shortcomings of this debut.


2014-02-27

2014-02-26: Russ Young, Margaret Kammerer, Michael Thieke Unununium, Areski-Fontaine x2

Journal d'écoute / Listening Diary 
2014-02-26

RUSS YOUNG / Common Pond (Russ Young)
Je n’ai pas l’habitude de faire ça (et je ne la prendrai pas), mais j’ai accepté de chroniquer ce démo de Russ Young. Common Pond propose une vision musicale pleinement formée, une approche soignée de la musique ambiante expérimentale. Des pièces courtes qui ont de la profondeur, une belle richesse côté palette sonore, des textures variées, et surtout un solide sens de la superposition. Je vois très bien ce disque avec sa place chez une étiquette comme Room40 ou 12k. Désolé de vous parler de quelque chose sur lequel vous ne pouvez pas mettre la main; j’en diffuserai un ou deux extraits à Délire actuel prochainement.
I don’t usually do that (and I won’t), but I accepted to review this demo by Russ Young. Common Pond puts forth a fully-formed artistic vision, a sleek approach of experimental ambient music. Short pieces with depth, richness in the sound palette, varied textures, and most of all a strong sense of overlaying. I could easily see this record at home on a label like Room40 or 12k. Sorry to write about something you can’t get your hands on yet, but I’ll broadcast a track or two on Délire actuel soon.

MARGARET KAMMERER / Why is The Sea So Blue (Mikroton)
J’ai, comment dire, “résisté” à la chanteuse-guitariste allemande Margaret Kammerer jusqu’à ce jour. Or, Why Is The Sea So Blue a eu raison de moi. Ce tour de chant est fort réussi. Kammerer ne figurera problablement jamais sur la liste de mes chanteuses préférées (quelque chose dans son grain m’irrite), mais le travail de composition et d’arrangement de ces nouvelles chansons m’épate. Kammerer y met en musique des poèmes de Cummings et Coleridge, entre autres, mais aussi des paroles de chansons très connues (“My Foolish Heart,” “Everytime We Say Goodbye” de Cole Porter) pour lesquelles elle a écrit de nouvelles musiques. C’est très intéressant. Elle est aussi bien entourée: Christof Kurzmann (mais uniquement aux choeurs et au saxo; pas d’électroniques), Axel Dörner, Burkhard Stangl et Werner Dafeldecker (les deux derniers de Polwechsel). Plus convaincant que les albums du groupe The Magic I.D. (dont font partie Kammerer et Kurzmann).  [Ci-dessous: Vidéo officielle pour la pièce titre, texte et musique de Kammerer.]
How can I say this... until now, I had “resisted” to German singer/guitarist Margaret Kammerer. But Why Is The Sea So Blue is winning me over. This song cycle is just too good to resist. I will probably never include Kammerer in my top female vocalists – something about her timbre irritates me – but the composition and arrangement work in these new songs is stunning. Kammerer turned poems by Cumming and Coleridge (among others) into songs, and lyrics from well-known songs (“My Foolish Heart,” Cole Porter’s “Everytime We Say Goodbye”) into brand new songs. Very interesting approach. And she is well surrounded: Christof Kurzmann (on back vocals and saxophone only; no electronics), Axel Dörner, Polwechsel’s Burkhard Stangl and Werner Dafeldecker. More convincing than the albums by Kammerer and Kurzmann’s band The Magic I.D.  [Below: Official promo video for the title track, lyrics and music by Kammerer.]

MICHAEL THIEKE UNUNUNIUM / Nachtlieder (Mikroton)
Je me souviens d’un album du projet Unununium de Michael Thieke qui remonte à 2004, et il s’agissait d’un quartet. Cette fois, bam!, le groupe a presque doublé de volume. À Thieke (clarinette), Luca Venitucci (accordéon), Derek Shiley (basse) et Eric Schaefer (batterie) s’ajoutent Martin Siewert (guitare), Christian Weber (basse) et Steve Heather (batterie). Ce à quoi il faut ajouter des enregistrements de terrain réalisés par Thieke et intégrés aux improvisations collectives et aux compositions. Cette musique s’installe autant dans les field recordings que l’inverse, ce qui tisse une ambiance captivante. J’aime beaucoup.
I remember a CD from 2004 by Michael Thieke’s Unununium project, and it was a quartet recording. This time, bam!, the band has almost doubled in size. To Thieke (clarinet), Luca Venitucci (accordion), Derek Shiley (bass) and Eric Schaefer (drums) are added Martin Siewert (guitar), Christian Weber (bass) and Steven Heather (drums). AND you need to factor in Thieke’s field recordings which are integrated to the collective improvisations and his own compositions. Music and field recordings play off each other, weaving a captivating soundworld. I like this a lot.

ARESKI-FONTAINE / Le Bonheur (Saravah)
Jeté par terre par les deux premiers “vrais” albums de Brigitte Fontaine (récemment réédités chez Superior Viaduct), je poursuis mon exploration de ce merveilleux ovni de la chanson française par un détour dans sa discographie en duo avec son comparse et compagnon de vie Areski Belkacem. Le Bonheur (1975) n’est pas un disque facile. S’y entremêlent chansons cocasses, contes tordus, ballades sulfureuses et bouts de théâtre absurde, le tout dans un mode très lo-fi. Attachant, déjanté, mais un peu frustrant à l’écoute.
Knocked over by Brigitte Fontaine’s first two “real” LPs (recently reissued on Superior Viaduct), I decided to push further my investigations in this wonderful French chanson UFO with a slight detour through her discography with partner in art and life Areski Belkacem. Le Bonheur (1975) is not an easy listen. It’s a pile-up of funny songs, twisted tales, torrid ballads, and bits of absurdist theatre, all executed in lo-fi fashion. Endearing, off-kilter, but a bit frustrating, and French-deaf listeners will probably have a hard time with this one.

ARESKI-FONTAINE / Vous et nous (Saravah)
Vous et nous (1977) est fort supérieur au Bonheur... et plus généreux, puisqu’il s’agit d’un album double. Le côté théâtral est essentiellement mis de côté et les chansons sont plus étoffées (avec des électroniques abstraites ici et là). Surtout, les textes sont savoureux, ainsi que les harmonies vocales. On s’amuse encore beaucoup, et sous l’apparente douceur et la quiétude, c’est souvent grinçant. [Ci-dessous: “Cher”.]
Vous et nous (1977) is much better than Le Bonheur... more generous too, as it was a double LP. The theatrical aspect of the duo’s concerts has been left off this album (save a couple of very short bits). Mostly the lyrics (all in French) are extremely rich, and there’s some great vocal harmonies too. It’s a fun record, and a scathering one too under its quiet and folky disguise.  [Below: “Cher.”]