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2014-11-12

2014-11-11: Steve Lacy, Spontaneous Music Ensemble, François Bayle

Journal d'écoute / Listening Diary 
2014-11-11

STEVE LACY / Cycles (Emanem)
Il y a tant de groupes hommages à Steve Lacy ces temps-ci qu’on ne saurait oublier l’importance qu’a eu et qu’a toujours le répertoire de ce très grand jazzman. Or, à mon avis, c’est dans ses albums solo qu’il révèle toute sa grandeur, toute la finesse de son mélodisme, toute l’importance de ses techniques étendues (pionnières à l’époque, monnaie presque courante aujourd’hui). Frais paru, Cycles est un album double qui présente trois grands cycles compositionnels de Lacy, plus quatre autres morceaux. La pièce de résistance est le cycle “Shots”, 65 minutes, colligé à partir de trois sources de 1976-1977. C’est Lacy à son meilleur: tendre, inventif, humoristique aussi. “The Kiss” et “The Wire” en sont les morceaux les plus connus; quatre morceaux sont très rares. “Sands” est pour moi la grande découverte de cet album: une suite de 21 minutes d’un grand lyrisme, d’une beauté toute Lacyienne, enregistrée en 1980. “Hedges” (36 minutes), un duo avec un danseur dont entend parfois les pas, est plus aride; elle a l’expérimentation plus revêche. Ce double me semble plus important, historiquement et musicalement, que les deux volumes d’Avignon and After, quoi qu’on n’aura jamais trop de Lacy seul au saxo soprano.
There are so many Steve Lacy tribute bands making the rounds these days that one could hardly ignore the importance his repertoire had and still has. However, for me, the best place to experience all his grandeur, the finesse of his melodies, and the importance of his extended techniques (revolutionary at the time, almost commonplace now) is on his solo albums. Just released, Cycles is a 2-CD set featuring three of Lacy’s compositional cycles from the ‘70s plus four other pieces. The piece the resistance is the 65-minute cycle “Shots”, culled from three different sources from 1976-1977. This is Lacy at his best: moving, inventive, witty. “The Kiss” and “The Wire” are the best-known pieces from this cycle, but four more are very rare. In my view “Sands” is the major discovery on this set: a 21-minute suite of great lyricism and the incarnation of Lacyian beauty recorded in 1980. “Hedges” (36 minutes), a duo with a dancer whose steps can be heard in the background, is a more arid affair, its experiments having a coarser quality. I find this double CD set more important, historically and musically, than the two volumes of Avignon and After, although we’ll never have too much solo soprano sax music from the Steve Lacy archives.

SPONTANEOUS MUSIC ENSEMBLE / Oliv & Familie (Emanem)
La réédition tant attendue du troisième album (éponyme) du SME, enregistré en 1969 par Eddie Offord et réalisé par Giorgio Gomelsky (étonnant, non?). À l’origine, ce disque proposait deux réalisations d’une même composition, “Oliv”, d’abord en ensemble étendu (Wheeler, Bailey, Watts, trois voix, Lemer, Dyani et Stevens), puis en quartet (Watts, Dyani, Stevens et Maggie Nicols dans sa toute première session studio). La version grand ensemble est agréable mais étrange et présente des contrastes très saisissants – c’est un projet spécial développé pour la session, peu représentatif du SME de l’époque. La version en quatuor, par contre, est sincèrement magique, un des meilleurs moments sur disque du SME, d’autant plus qu’après le thème composé suit une improvisation magnifique qui se résout en deux canevas de Stevens, “Sustained Piece” et “Click Piece”. Ce matériel, réédité ici pour la première fois sur CD, est complété par une session de janvier 1968 qui propose le premier enregistrement connu de “Familie”, très différent de la version sur Frameworks (beaucoup plus lent aussi), avec un ensemble qui inclut deux voix (pas Nicols), Watts, Bailey, Evan Parker, Dave Holland et quelques autres. La deuxième prise est particulièrement jouissive. Merci, Emanem.
The anticipated reissue of the SME’s eponymous third LP, recorded in 1969 by Eddie Offord and produced by Giorgio Gomelsky (surprising, not?). The original LP featured two performances of a single composition called “Oliv”, first as a large ensemble (Wheeler, Bailey, Watts, three vocalists, Lemer, Dyani, Stevens), then with the then-regular SME line-up (Watts, Dyani, Stevens, and Maggie Nicols in her first studio session). The large ensemble version is enjoyable but weird, with sharp contrasts the likes of which are found nowhere else in the SME’s oeuvre – it was a special projet designed especially for that studio session. The quartet version, however, is magical, honestly one of the SME’s finest moments on record: the composed theme is followed by a gorgeous free improvisation that resolves in two of Stevens’ improvisation canvases: “Sustained Piece” and “Click Piece”. This material, reissued on CD for the first time here, is complemented by a session from January ’68 featuring the firat known recording of “Familie”, very different from (and much slower than) the version found on Frameworks, with an esenble that includes two vocalists (sans Nicols), Watts, Bailey, Evan Parker, Dave Holland and a few more. The second take is particularly delectable. Thank you, Emanem.

FRANÇOIS BAYLE / Les Couleurs de la nuit (Sub Rosa)
Dans les archives des pionniers de l’électroacoustique, il y a les morceaux sans intérêt, les morceaux obscurs mais intéressants et les bijoux méconnus. Les Couleurs de la nuit (38 minutes, 1982) est un bijou méconnu. Suite électroacoustique en neuf parties enchaînées, on se compare aisément – en portée, en palette, en profondeur et en maîtrise – à Sous le regard d’un soleil noir de Francis Dhomont. La différence, c’est qu’elle est moins sombre que cette dernière et plus vive. L’attention est constamment sollicitée, sans qu’on atteigne le point de saturation. Il y a dans Les Couleurs de la nuit tout ce que j’aime de l’électroacoustique: l’objet sonore qu’on étudie, l’histoire qu’on raconte (une histoire sans programme, narrée par le son), la logique interne qui se construit, indescriptible et pourtant incontournable. Un must.
In the archives of the electroacoustic pioneers, you have your unworthy bits, your obscurte but interesting pieces, and your little-known (or circulated) gems. Les Couleurs de la nuit (38 minutes, 1982) is a little-known gem. This electroacoustic suite in nine segued movements compares easily – in scope, palette, depth, and mastery – to Francis Dhomont’s Sous le regard d’un soleil noir. Except that it’s less claustrophobic and livelier. Your attention is constantly being sollicited, but Bayle never crosses the threshold of saturation. Les Couleurs de la nuit has everything I expect and love in electroacoustic music: studies of sound objects, a tale (an abstract tale told only through sound), internal logical that builds itself between your ears in ways undescribable yet unavoidable. This is a must-have.


2013-07-23

2013-07-22: Spontaneous Music Ensemble, Tank of Danzig


Journal d'écoute / Listening Diary 
2013-07-22

SPONTANEOUS MUSIC ENSEMBLE / Challenge (Emanem)
Il s’agit simplement de la réédition sous pochette cartonnée de la réédition précédente (2001) d’Emanem, en boîtier de plastique. Pour le reste, c’est le même album (avec les mêmes extras) – le premier SME, un petit bijou de jazz actuel, 1966, qui annonce ce qui suivra tout en demeurant ancré dans la tradition du jazz. Un must.
This is simply a reissue in a cardboard sleeve of Emanem’s previous reissue (2001) in a jewel case. For the rest, it’s the same album (with same bonus tracks), i.e. the SME’s debut, an avant-jazz gemm from 1966 that foretold what would follow while remaining anchored in jazz history.

SPONTANEOUS MUSIC ENSEMBLE / New Surfacing, 1978 & 1992 (Emanem)
Celui-ci est un nouveau titre, mais il regroupe des pièces déjà parues sur CD. “Newcastle 78A” et “Newcastle 78B” figurent sur Trio & Triangle (2008); on trouve une version écourtée de “Complete Surfaces”, à titre de pièce bonus, sur l’édition Konnex (1994) de 4, 4, 4. Dans les deux cas, l’alignement du SME est celui de John Stevens, Nigel Coombes et Roger Smith (à 14 ans d’intervalle), et dans les deux cas, Emanem a pu utiliser les bandes originales au lieu de copies sur cassette. Le son est nettement meilleur, et ce sont des prestations fort satisfaisantes d’un groupe dont la musique n’est jamais facile.
This one is a new title, but it culls pieces that were already available on CD. “Newcastle 78A” and “Newcastle 78B” are found on Emanem’s Trio & Triangle (2008), while an edited version of “Complete Surfaces” appears as a bonus track on the 1994 Konnex edition of John Stevens’ 4, 4, 4. On both cases, the line-up is Stevens, Nigel Coombes and Roger Smith (recorded 14 years apart), and in both cases Emanem has had access to the original tapes instead of the cassette copies previously used. The sound is significantly better, and these are very satisfying performances from a group whose music never was easy.

TANK OF DANZIG / Not Trendy (Music à la coque)
La petite étiquette italienne Music à la coque vient de mettre au jour un groupe allemand punk/no-wave complètement oublié: Tank of Danzig. Cette réédition sur CD de leur album Not Trendy (1982) inclut aussi les chansons de leur premier 45 tours et du mini-album Your Brain. Mélange de punk, de funk no-wave à la James Chance et de musique de danse exacerbée (pensons à une version moins hype des Stickmen). L’interprétation et la qualité d’enregistrement sont un peu crues, et les paroles sont parfois dans un anglais approximatif, mais Tank of Danzig s’avère une découverte de choix.  [Ci-dessous: Écoutez tout l’album sur bandcamp.]
The small Italian label Music à la coque just unearthed a German punk/no-wave band no-one remembers: Tank of Danzig. This CD reissue of their 1982 LP Not Trendy also includes the contents of their debut 7” and their EP Your Brain. A blend of punk, no-wave funk a la James Chance, and off-kilter dance music (think a slightly sedated version of The Stickmen). Performance and recording quality are pretty rough, and the English lyrics are somewhat approximate, but Tank of Danzig proves to be quite a discovery.  [Below: Stream the whole album on bandcamp.]