Journal d'écoute / Listening Diary
2013-06-20
MATS/MORGAN / Radio Da Da/The Teenage Tapes (Cuneiform)
J’ai écouté le premier disque de cet album double hier
et le second aujourd’hui. Réédition des troisième et quatrième disques du duo
Mats/Morgan et, comme dans le cas de la réédition de The Music or the Money,
Morgan Ågren a remixé, ajouté du matériel inédit et reséquencé les disques pour
en faire des propositions très différentes. Cela dit, l’esprit de chacun de ces
disques est conservé. Radio Da Da (enregistré en
1992, publié en 1998) propose un menu éclectique, fortement influencé par Frank
Zappa et truffé de belles idées folles, comme “Kul i Parken” et “Moon Dog”. Un
peu moins dément et lumineux que The Music or the Money. The
Teenage Tapes (aussi publié en 1998) regroupait à l’origine des
enregistrements maison faits entre 1981 (ils n’étaient que des enfants) et
1996, mais Ågren a tissé quelques trucs plus récents dans la séquence.
Certaines pièces sont des idées à l’état brute, d’autres des pièces pleinement
formées enregistrées sur un quatre-pistes. On trouve aussi une reprise d’une
vieille pièce instrumentale de Gino Vannelli (!) et quelques épisodes
dadaesques (ou devrais-je dire zappesques). Si la qualité sonore de ce second
disque est inférieure, les pièces s’enchaînent de manière enlevante. Dans
l’ensemble, ce double est l’égale de Trends, inférieur à The
Music or the Money, et fort amusant. Mats Öberg et Morgan
Ågren n’ont pas fait un seul mauvais disque ensemble. Un bémol: le livret
comporte de nombreuses erreurs (ordre des pièces, identification des pièces
inédites), ce qui est très rare chez Cuneiform. [Ci-dessous: “Djungle Man”.]
I have listened to disc 1 of this 2-CD set
yesterday and disc 2 this morning. Reissue of Mats/Morgan’s third and fourth
albums and, as was the case with Cuneiform’s reissue of The
Music or the Money, Morgan Ågren has remixed, added
unreleased material and resequenced the discs to turn this set into a very
different proposition. However, the spirit of each disc has been maintained. Radio
Da Da (recorded in 1992, released in 1998) features a highly eclectic set of
tunes strongly influenced by Frank Zappa. There are lots of fine crazy ideas in
here, like “Kul i Parken” and “Moon Dog.” However, this album is less zany and
brilliant than The Music or the Money. The
Teenage Tapes (also released in 1998) culled home recordings from 1981 (they
were only kids) to 1996, but Ågren has added more recent material to the
sequence. Some tracks are raw ideas, others are fully-formed pieces recorded on
a four-track machine. There is also a cover of an old Gino Vannelli
instrumental, and a few Dada (or should I say Zappa) episodes. Sound quality is
lesser on this second disc, but the dynamic pace of the sequence keeps things
interesting. All in all, this twofer is equal to Trends,
inferior to The Music or the Money, and quite a fun ride. Mats
Öberg and Morgan Ågren have not made a bad record together. One bad point: the
booklet is riddled with errors (track listing, identification of previously
unreleased tracks) – unusual for Cuneiform. [Below: “Djungle Man.”]
Le duo Kristoff K.Roll (Carole Rieussec et
Jean-Christophe Camps) a toujours eu un talent incroyable pour raconter des
histoires électroacoustiques. Ce sont des conteurs de sons. Et À l’ombre des
ondes est un (autre) grand crû. Ce CD consiste en trois
pièces (28, 7 et 27 minutes) conçues comme des “siestes audio-parlantes” à
écouter individuellement, au repos, sous casque. C’est ce que j’ai fait.
Illusions sonores jouant sur les bruits environnants (un avion qui passe, des
conversations de passants, une mouche), traitements acousmatiques, unvers
sonores tissés avec finesse pour intriguer le conscient et le subconscient, et,
à travers tout ça, des récits de rêves. Du grand art électroacoustique, et la
preuve que cet art, parfois si abstrait et cartésien, peut être aussi
profondément humain... et rêveur. [Ci-dessous: Ce lien vous mènera à un
extrait de “Méridienne allongée”.]
The duo Kristoff K.Roll (Carole Rieussec and
Jean-Christophe Camps) have always been incredibly talented at telling
electroacoustic stories. They are soundtellers. And À l’ombre
des ondes [“In the shadows of waves”] is (another) major opus. This CD
features three pieces (28, 7, 27 minutes) designed as “audio-talking naps” to
be listened to individually, at rest, on headphones. That’s what I did. Audio
illusions playing with background sounds (a plane flying by, conversations of
passers-by, insects), acousmatic treatments, soundworlds carefully woven to
intrigue the mind, consciously and subconsciously, and through it all, dream
narratives in French – sorry, non-French-speaking readers, but you will be
missing out here. Great electroacoustic art, and proof that this art, which at
times can be abstract and methodical, can also be deeply human... and
dreamy. [Below: This link will
take you to an excerpt from “Méridienne allongée.”]
SIGUR RÓS / Kveikur (XL Recordings)
Première écoute du nouveau Sigur Rós, un groupe dont
j’ai écouté chaque album à plusieurs reprises. Il se pourrait donc que je
regrette mes propos, voire que je me récuse un de ces quatre matins. Or, autant
Valtari m’a séduit à la première écoute, autant Kveikur me
laisse... je ne dirai pas froid, mais tiède. Parce que Sigur Rós n’a pas encore
pondu un mauvais disque en carrière. D’abord, Kveikur est
l’antithèse de Valtari. Les pièces sont courtes, rock, souvent
punchées, bruyantes, à l’image d’un groupe qui perd son claviériste et se
retrouve en mode power trio (guitare, basse, batterie). Ensuite, la production
souffre du syndrome “toutes les aiguilles dans le rouge” – ça manque de
finesse, de dégradés. On verra bien avec le temps...
First listen of the new Sigur Rós, a band whose
albums I have listened to many times. So I might regret what I am about to
write, I might even recant myself one of these days. But, while Valtari
had seduced me (and brought me to tears) on the very first listen, Kveikur
leaves... I can’t say cold, but lukewarm at best – after all, Sigur Rós have
not made a bad album yet, and Kveikur is not a bad album. First
of all, Kveikur is the antithesis of Valtari.
Songs are short, punchy, noisy, rock, as could be expected from a band who just
lost their long-time keyboardist and find themselves reduced to a power trio
(guitar, bass, drums). Second, the production suffers from the “all needles in
the red” syndrome – it lacks finesse, nuances. Time (and further spins) will
tell..
THE LAST HURRAH!! / The Beauty of Fake (Rune Grammofon - merci à/thanks to Forced Exposure)
Je comptais sur le projet de HP Gundersen, dont
l’album précédent était fort agréable, pour me remonter le moral, mais non. The
Beauty of Fake, malgré son concept (la facticité) et les paroles qui
le développent, manque de gueule. Il s’agit d’une suite en huit parties
(présentées en une seule piste de 35 minutes sur le CD), un voyage mental qui
nous mène en Inde, en Arabie, au Japon et à Hawaï – ou plutôt dans des versions
ultra-stéréotypées et touristiques de ces endroits. L’idée est intéressante,
mais sa réalisation s’avère ennuyeuse, trop légère.
I was counting on HP Gundersen’s project to cheer
me up – his previous album was pretty neat – but no. The
Beauty of Fake, despite its concept (fakeness) and the lyrics that develop
it, lacks oomph. It’s an eight-part suite (presented as a single 35-minute
track on the CD), a head trip that takes us to India, Arabia, Japan, and Hawai
– or rather to ultra-stereotypes and tourist-ready versions of these places. A
good idea on paper, but its execution proves to be boring, too light.