Journal d'écoute / Listening Diary
2014-02-06
Le trompettiste montréalais Craig
Pedersen m’a envoyé deux productions maisons, des éditions sur CDr sous
pochette au plus simple. Why paint at
all? propose une série de réflexions sur l’œuvre du même titre de Mark
Rothko. Avec Linsey Wellman au saxo alto, Joel Kerr à la contrebasse et Mike
Essoudry à la batterie. 20 minutes, cinq pièces. Chacune part d’une idée
simple, qu’elle soit mélodique ou bruitiste. Le clou de l’album est “Shhh”,
neuf minutes, un thème répété inlassablement. J’y entends quelque chose de Robert
Wyatt, dans la mélancolie et l’arrangement (mélodie précise entourée de
fluctuations harmoniques, brouillonnes, qui la renforcent). Bravo. [Ci-dessous: Deux extraits de l’album (pas
“Shhh”, malheureusement – je vous la ferai entendre bientôt à Délire actuel).]
Montreal trumpeter Craig Pedersen sent me two home-made productions.
These are CDr editions in super-simple sleeves. Why paint at all? features a
series of reflections on the same-titled work by Mark Rothko. With Linsey
Wellman on alto sax, Joel Kerr on doublebass, and Mike Essoudry on drums. 20
minutes, five tracks. Each piece stems from a simple idea, be it melody- or
noise-based. The highlight is the nine-minute “Shhh”: a theme gets repeated
again and again, and I hear in it something Robert Wyatt-ish, in its
mellancholy feel and the arrangement (a specific melody surrounded by blurry
harmonic fluctuations that give it strength). Bravo. [Below: Two tracks from
the album (but no “Shhh”, sadly – I’ll broadcast it on Délire actuel soon).]
Les sessions de ces deux CDr ne sont
pas datées. Je ne connais donc pas leur ordre. Mais la moitié de ce disque (de
27 minutes) reprend les canevas d’improvisation de Pedersen qui figurent sur Why paint at all? (à l’exception de
“Shhh”). Musiciens différents (dans l’ordre de l’intitulé: trompette, saxos,
violoncelle, batterie/radio) et approche différente: ce quatuor propose une
lecture beaucoup plus abstraite des compositions, plus bruitiste aussi. Ici,
“Yellow and Green” fait s’alterner deux notes/couleurs, alors que sur l’autre
disque, la pièce avait un peu plus de viande autour de l’os. Or, je crois que
je préfère cette version-ci. Son méthodisme me rappelle le groupe Polwechsel.
Tout l’album, en fait, est au croisement de l’improvisation non idiomatique et
du formalisme minimaliste. Les deux disques sont donc complémentaires, le
premier dégageant plus de chaleur que le second.
The sessions of these two CDrs are not specified, so I don’t know which
one came first. But one half of this 27-minute disc consists of the same
Pedersen-penned improvisation frameworks presented on Why paint at all?
(omitting “Shhh”). However, the line-up is different (in order of the title
line: trumpet, saxes, cello, drums/radio), and so is the approach: this quartet
delivers a much more abstract and noise-based take on the compositions. Here,
“Yellow and Green” consists of two alternating notes/colours, while the version
on the other record had more meat around the bone. I prefer this version
though; it reminds me of the band Polwechsel. Actually, the whole album is at
the crossroads of non idiomatic improvisation and minimalist formalism. So
these two records complement each other, with the first one being warmer than
the second one.
Toons est un quintette du violoncelliste
Valentin Ceccaldi, que j’ai appris à connaître dans le Théo Ceccaldi Trio. En
fait, Théo (violon) et Guillaume Aknine (guitariste du trio) font partie de
Toons, ainsi que Gabriel Lemaire (saxos) et Florian Satche (batterie). 7 nains propose une composition unique
(37 minutes) en sept mouvements, suivie d’un mouvement supplémentaire “caché”
après cinq minutes de silence. Alors que l’écriture de Théo est jazz avec un
penchant ECM, celle de Valentin est plus anguleuse et bravarde, énergique aussi.
Et bruitiste à l’occasion. J’ai des doutes sur la cohérence de l’ensemble de
cette suite, mais je m’y suis amusé – beaucoup de passion, d’assurance et un
brin de folie. C’est décidé, il y aura un profil des Ceccaldi à Délire actuel
prochainement.
Tooms is a quintet led by cellist Valentin Ceccaldi, whom I first heard
in the Théo Ceccaldi Trio. Actually, Théo (violin) and the trio’s guitarist
Guillaume Aknine are also in Toons, alongside Gabriel Lemaire (saxes) and
Florian Satche (drums). 7 nains (“7 dwarfs”) consists in a single piece in
seven movements – plus another one “hidden” after five minutes of silence.
While Théo’s writing can be described as a variant of ECM creative jazz,
Valentin’s music is more angular, in-your-face, energetic... and noisy at times.
I have doubts about the coherence of the suite as a whole, but I had fun with
it – lots of passion, assurance, and a dash of wildness. And I just decided
that there will be a feature on the Ceccaldis on my radio show soon.
Électronique minimaliste aux bases
techno et dub. Il y a des moments qui atteignent une certaine perfection
formelle, mais dans l’ensemble ça me laisse froid, tout particulièrement
lorsqu’une voix robotisée fait son apparition dans “Evening Redness is the
West”.
Minimal electronica with techo and dub foundations. Some passages
achieve a certain level of formal perfection, but the album leaves me cold as a
whole, and especially “Evening Redness in the West” and its robotic voice.
Unbekannte se traduit par “quantité
inconnue”, et il est clair que ce disque nous plonge dans un univers inconnu où
les quantités – et les qualités – demeurent mystérieuses. La forme est presque
pop, mais l’approche est expérimentale. Solos de cymbales, textures bizarres et
détournements en tous genres meublent ce dique qui, pour le reste, contient
quelques chansons, parfois déconstruites, comme ce “Baby I Don’t Know Right
Now” qui ne propose que des voix, l’accompagnement musical brillant par son
absence (longues pauses incluses). Écoute exigeante, mais j’aime les énigmes et
celle-ci m’invite à y retourner. [Ci-dessous: Écoutez tout l’album sur
soundcloud.]
Unbekannte means “unknown quantity”, and this record clearly takes us
through unknown territories where quantites – and qualities – remain obscure.
The format is almost pop, but the process is experimental. Cymbal solos, weird
textures, and all kinds of sonic hikacking fill this album, which also contains
a few songs, deconstructed at times, like this “Baby I Don’t Know Right Now”
that only has vocals, the musical accompaniment clearly missing (stretches of
silence and all). A demanding listen, but I like enigmas, and this one’s
begging for a few more spins. [Below:
Stream the whole album on soundcloud.]
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